Notre acharnement a fini par payer ! Après 6 années de combats judiciaires, la préfecture de la Guadeloupe a enfin cédé : le projet d’arrêté encadrant la saison de chasse 2020-2021 ne prévoit pas la chasse de la grive à pattes jaunes et du pigeon à couronne blanche, deux oiseaux au statut de conservation défavorable.
Comment on en est arrivé là
Depuis quelques années, et grâce à Béatrice Ibéné, déléguée en Guadeloupe et présidente de l’association locale ASFA¹, l’ASPAS s’intéresse au sort réservé à ces deux oiseaux menacés d’extinction et pourtant toujours chassés dans les Antilles françaises. Depuis 2014, 12 recours juridiques ont été engagés par les deux associations rejointes par la LPO, et tous ont été couronnés de succès.
En 2014 et 2015, les associations ont fait suspendre en urgence la chasse de la grive à pieds jaunes, endémique des Petites Antilles et présente de manière certaine sur seulement trois îles au monde. En 2016, la chasse de cette espèce a été interdite suite à l’intervention de Barbara Pompili, secrétaire d’État chargée de la biodiversité qui avait reçu nos associations. En 2017, les ouragans violents survenus dans cette région ont mis à mal toute la faune, ce qui a conduit le préfet à suspendre la chasse de manière générale, sous la pression des associations locales.
La chasse du pigeon à couronne blanche, endémique des Caraïbes, était quant à elle autorisée pendant toute la période de chasse², soit en pleine période de nidification et de reproduction, sans qu’aucun quota ne soit fixé. Grâce aux recours des associations, un quota global et des quotas par chasseur ont été fixés et sa période de chasse réduite à deux mois.
Pour la saison 2019/2020, nos associations sont à nouveau montées au créneau et le tribunal de Basse-Terre a suspendu en urgence la chasse de ces deux espèces. Grâce à cette action, aucun oiseau n’a été tué cette saison !
Fortes de ces décisions, les associations ASPAS, ASFA et LPO ont une nouvelle fois interpellé le ministère chargé de l’Ecologie pour ces deux espèces inscrites sur la liste rouge des oiseaux menacés de l’UICN³. Il est désormais grand temps que les pouvoirs publics témoignent de leur souci de préserver les richesses naturelles et fragiles d’outre-mer en accordant à ces espèces le statut d’espèce protégée.
Disons « merci ! mais… » à la Préfecture en participant à la consultation publique !
C’est en ce sens que nous vous proposons de réagir positivement – une fois n’est pas coutume ! – à la consultation publique en cours pour remercier la Préfecture de proposer pour la saison 2020-2021 l’interdiction de la chasse de ces deux oiseaux.
Mais bien entendu, n’oublions pas que cet arrêté autorise dans le même temps la chasse à de nombreuses autres espèces d’oiseaux…
Voici quelques points de vigilance sur lesquels vous pouvez rebondir dans votre message :
– Le texte autorise la chasse de la tourterelle à queue carré en période de reproduction (il aurait fallu au minimum décaler au 15 aout ). De plus, ces tourterelles sont interdites à la consommation car potentiellement contaminées par la chlordécone (populations dite du « croissant bananier ») ;
– Le texte autorise la chasse dans des territoires lourdement impactés par les cyclones de 2017, sans avancer quelconque étude fiable permettant d’assurer que les espèces ont déjà recouvré leur effectifs ;
– Plus généralement, le nombre d’espèces d’oiseaux chassables en Guadeloupe reste très élevé par rapport aux autres îles des Petites Antilles, et par rapport à l’Hexagone.
Pour participer, écrivez à chasse.guadeloupe@developpement-durable.gouv.fr avant le 27 juin 2020.
1 – Association pour la sauvegarde et la réhabilitation de la faune des Antilles
2 – La période de chasse dans les Antilles s’étend de mi-juillet à début janvier.
3 – Union internationale pour la conservation de la nature