• Etats-Unis : la directrice de la communication de la Maison Blanche jette l'éponge et démissionne

    Ce départ d'Alyssa Farah s'apparente à une reconnaissance tacite de la défaite de Donald Trump.

    Article rédigé par
    France Télévisions
    Publié le 03/12/2020 23:55 Mis à jour le 04/12/2020 09:25
     
    La directrice de communication de la Maison Blanche, Alyssa Farah, à Washington (Etats-Unis), le 8 octobre 2020. (CHIP SOMODEVILLA / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)La directrice de communication de la Maison Blanche, Alyssa Farah, à Washington (Etats-Unis), le 8 octobre 2020. (CHIP SOMODEVILLA / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

    Nouvelle défection dans le camp Trump. Alyssa Farah, directrice de la communication de la Maison Blanche, a annoncé jeudi 3 décembre sa démission, dans ce qui s'apparente à une reconnaissance tacite de la défaite du président sortant.

    "Après trois années et demie incroyables, je vais quitter la Maison Blanche pour me consacrer à d'autres projets", a écrit sur Twitter celle qui fut porte-parole du vice-président Mike Pence, puis du Pentagone, avant d'accéder à son poste actuel.

    "Je suis très fière des choses incroyables accomplies pour rendre notre pays plus fort et plus sûr", ajoute-t-elle, sans jamais citer Donald Trump, dont le mandat s'achèvera le 20 janvier.

    Alyssa Farah
    @Alyssafarah
    It’s been the honor of a lifetime to serve in the Trump Administration over the last 3 and a half years, first as Press Secretary to @VP Pence, then as Press Secretary for the @DeptofDefense, & most recently as White House Communications Director.
    7,1 k
    1,2 k personnes tweetent à ce sujet.

    Depuis l'élection du 3 novembre, remportée par Joe Biden mais dont Donald Trump a jusqu'ici refusé de reconnaître le résultat, elle s'est montrée assez discrète. Son attitude contrastait avec celle de Kayleigh McEnany, porte-parole de la Maison Blanche, qui a inlassablement relayé les accusations de fraude du président, sans éléments tangibles à l'appui.

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  • De la Fed au Trésor américain : le parcours sans faute

    de Janet Yellen

     

     
    Sébastian SEIBT
     

    Janet Yellen est pressentie pour être la future secrétaire au Trésor de Joe Biden  

    © REUTERS - Jonathan Ernst Janet Yellen est pressentie pour être la future secrétaire

    au Trésor de Joe Biden

    La nomination annoncée de Janet Yellen comme secrétaire au Trésor du président élu Joe Biden apparaît comme l’aboutissement logique pour l’ancienne patronne de la Fed, devenue l’une des économistes les plus respectées à gauche sur l’échiquier politique américain. 

     

    Ce sera une première en 237 ans d’histoire. La nomination attendue de Janet Yellen au poste de secrétaire au Trésor - l’équivalent américain du ministre de l’Économie - du futur gouvernement du président élu Joe Biden ferait d’elle la première femme à occuper ce poste.

    Si ce choix, annoncé par plusieurs médias américains lundi 23 novembre, venait à se confirmer, Janet Yellen multiplierait même les premières fois. Celle qui a été la première femme à occuper le poste de directrice de la Fed, entre 2014 et 2018, deviendrait la première personne à avoir été successivement présidente du Conseil des conseillers économiques d’un président - sous Bill Clinton -, patronne de la Banque centrale américaine et secrétaire au Trésor. Un CV à faire pâlir d’envie n’importe quel économiste ou haut fonctionnaire.

    À gauche mais acceptable pour les républicains ?

    “Sa nomination va être accueillie favorablement par tous, aussi bien dans les milieux universitaires, que parmi les dignitaires étrangers et les acteurs des marchés financiers. Tout le monde la considère comme une dirigeante très expérimentée qui a su assurer une longue période de stabilité économique aux États-Unis [en tant que directrice de la Fed, NDLR]”, a assuré Mohamed El-Erian, président du Queen’s College de l’Université de Cambridge, interrogé par le Financial Times. Lorsqu’elle avait quitté la Réserve fédérale, en 2018, l’économie américaine était au beau fixe “avec un chômage au plus bas depuis 20 ans”, rappelle le Wall Street Journal.

    L’option Yellen est aussi politiquement très attirante pour Joe Biden. Cette femme de 74 ans devrait satisfaire les attentes de l’aile progressiste du Parti démocrate : elle a multiplié, ces derniers mois, les prises de parole en faveur de plans de soutien à l’économie les plus généreux possibles, notamment pour les ménages les plus modestes et les petites entreprises, pour faire face à la crise économique engendrée par la pandémie de Covid-19.

    Son profil ne devrait, pour autant, pas effrayer les républicains au point de les pousser à tenter de bloquer sa nomination. “Elle est plutôt modérée sur plusieurs sujets importants”, relève le New York Times. Janet Yellen est ainsi plutôt une partisane du libre-échange et avait mis en garde, l’an dernier, les États-Unis contre la tentation de trop creuser les déficits. Une rigueur fiscale qui devrait lui faire gagner quelques points dans le camp conservateur.

    Mais qu’on ne s’y trompe pas. Sans être à la gauche de la gauche américaine, elle a défendu et appliqué tout au long de sa carrière des idées qui en font une personnalité du camp progressiste. Cette économiste de formation a fait ses classes à Yale où son mentor a été James Tobin, le célèbre inventeur de la taxe éponyme sur les transactions financières internationales.

    Contre l’obsession de l’inflation

    Son mari, qu’elle a rencontré peu après avoir fait ses débuts à la Réserve fédérale en tant qu'économiste, à la fin des années 1970, est George Akerlof, un économiste spécialiste du marché du travail qui a partagé le prix Nobel d’économie, en 2001, avec Joseph Stieglitz, l’une des influences majeures pour les politiques économiques dites de gauche aux États-Unis. “Nous avons toujours partagé les mêmes idées économiques avec ma femme. Notre seul désaccord est qu’elle est peut-être un peu plus en faveur du libre-échange que moi”, avait déclaré George Akerlof l'année où il a reçu sa prestigieuse récompense.

    Janet Yellen appartient donc à la grande famille des économistes keynésiens, un courant de pensée favorable à une intervention de l’État pour corriger les dysfonctionnements du marché. Des valeurs qu’elle a défendues tout au long de sa carrière au sein de la Banque centrale, où elle s’est distinguée à plusieurs reprises avant même d’en prendre la tête.

    C’est elle, notamment, qui est à l’origine de la célèbre règle de l’objectif de 2 % d’inflation, qui a longtemps été un mantra partagé par la plupart des banques centrales du monde entier. Janet Yellen a commencé dès les années 1990, en tant que membre du conseil des gouverneurs de la Fed, à critiquer la volonté farouche de la Réserve fédérale de maintenir l’inflation aussi proche que possible de 0. Elle pensait que les États-Unis pouvaient se permettre une petite hausse des prix si cela permettait d’injecter plus d’argent dans l’économie pour réduire le chômage.

    Encore elle qui, dès 2005, alors qu'elle dirigeait la branche de San Francisco de la Fed, a été la seule responsable de Banque centrale à avertir sur le risque d’explosion d’une bulle immobilière aux États-Unis. Et peu après que la crise des subprimes lui a donné raison, Janet Yellen a été la première au sein de la Banque centrale “à déclarer officiellement en 2008 que le pays était entré en récession”, souligne le New York Times. Un an plus tard, elle a été l’une des rares à comprendre que cette crise allait durer alors que son patron de l’époque, Ben Bernanke, affirmait encore que le pays allait rapidement se remettre sur pied.

    Sous sa direction, à partir de 2014, la Banque centrale américaine a continué à prendre ses distances avec sa vieille obsession de la maîtrise à tout prix de l’inflation. Janet Yellen a, non seulement, soutenu que la Fed devait également agir pour réduire le chômage, mais elle voulait aussi en faire un instrument de lutte contre les inégalités. Un domaine qui, jusqu’alors, n’avait jamais été une priorité de la vénérable institution monétaire.

    Mais les marchés financiers lui sont surtout reconnaissants de “s’être assurée que la Fed ne rejoigne pas la longue liste des banques centrales qui ont coupé l’herbe sous le pied des reprises économiques en rehaussant trop tôt les taux après une sortie de crise”, estime Bill Nelson, ancien vice-directeur de la Fed qui travaille aujourd’hui dans la finance, interrogé par le Wall Street Journal. Janet Yellen n’a commencé à faire remonter les taux qu’à partir de fin 2015, et seulement de manière très progressive.

    Elle semble donc avoir fait, jusqu’à présent, un sans faute, réussissant à satisfaire tout le monde. Pas sûr qu’elle pourra continuer sur sa lancée si elle devient effectivement la secrétaire du Trésor de Joe Biden. Elle occupera le poste le plus exposé politiquement, souligne le New York Times. D’un côté, elle devra au plus vite mettre en musique les promesses de Joe Biden de dépenser sans compter pour sortir le pays de la crise et réduire le chômage. De l’autre, elle devra composer avec des élus républicains au Congrès qui, confortés par leurs bons résultats lors des élections de novembre, vont tout faire pour réduire l’ampleur d’un futur plan de relance au nom du sacro-saint contrôle des déficits.

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  • En Corée du sud, les sectes à nouveau au cœur

    des contaminations au Covid-19

    Les autorités sanitaires et la Ville de Séoul ont déposé plainte, le 16 août, contre le leader de l’Eglise évangélique Sarang Jeil, le militant d’extrême droite Cheon Guan-hung, l’accusant de ne pas avoir respecté un ordre de quarantaine.

     

    Par Publié le 18 août 2020 à 12h52 - Mis à jour le 18 août 2020 à 14h19

     

     

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    Le leader de l’Eglise évangélique Sarang Jeil, Cheon Guan-hung, à Séoul, lundi 17 août 2020.Le leader de l’Eglise évangélique Sarang Jeil, Cheon Guan-hung, à Séoul, lundi 17 août 2020. Hong Hae-in/AP

     

    La Corée du Sud connaît une brusque résurgence des contaminations au Covid-19. Comme au début de la pandémie en février, les principaux foyers d’infection se trouvent au sein de mouvements évangéliques.

     

    Les Centres de contrôle et de prévention des maladies (KCDC) ont signalé mardi 18 août 246 nouveaux cas, pour un total de 15 761. Pour le cinquième jour, le nombre dépasse les 100 dans un pays qui semblait avoir réussi à endiguer la pandémie grâce à une efficace politique de dépistage massif et de traçage, tout en assurant un approvisionnement en masques et évitant tout confinement national.

     

    La situation est « grave », a reconnu le ministre de la santé, Park Neung-hoo. « Nous redoutons une propagation des infections dans tout le pays. » La veille, le ministère de la défense avait interdit aux militaires de quitter les bases pour des permissions.

     

    Lire aussi En Corée du Sud, le chef de la secte Shincheonji arrêté pour entrave à la lutte contre le coronavirus

     

    Lorsque la Corée du Sud a été touchée par la première vague fin février-début mars, le principal foyer de contamination était la branche de Taegu, dans le sud-est du pays, du mouvement évangélique Shincheonji. Plus de 5 000 fidèles avaient contracté le virus, forçant les autorités de Taegu à confiner ses habitants. Une vive polémique avait suivi car les responsables de la secte avaient tout fait pour ne pas communiquer la liste des adhérents. Son leader, Lee Man-hee, a été arrêté le 1er août pour obstruction aux opérations gouvernementales de lutte contre la pandémie.

     

    Liste tronquée

    Cette fois, c’est l’Eglise évangélique Sarang Jeil qui se trouve impliquée. Entre le 12 et le 18 août, pas moins de 319 cas ont été détectés parmi ses quelque 4 000 fidèles. Les autorités s’inquiètent car certains membres sont restés plusieurs jours en contact étroit.(...) Suite :Article réservé aux abonnés

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  • Lutte contre le Covid-19 : les leçons sud-coréenne et japonaise

    La Corée du Sud et le Japon ont été relativement épargnés par le Covid-19 et ignorent la déconnexion entre pouvoir et population. Respect de l’hygiène et responsabilité collective s’y enseignent dès l’école.

    Par et Publié le 19 octobre 2020 à 01h04 - Mis à jour le 19 octobre 2020 à 05h43

       

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    Deux femmes portent le masque devant le temple du quartier d’Asakusa, à Tokyo, le 13 octobre.Deux femmes portent le masque devant le temple du quartier d’Asakusa, à Tokyo, le 13 octobre. ISSEI KATO / REUTERS

    Analyse. Face à la crise sanitaire provoquée par le Covid-19, la Corée du Sud et le Japon ont agi différemment en matière de mesures gouvernementales. Mais les réactions collectives et individuelles des populations ont été similaires. Si ni Séoul ni Tokyo n’ont recouru au confinement total, les deux pays n’en enregistrent pas moins des bilans de la lutte contre le virus qui peuvent surprendre : en dépit de récentes phases de résurgence, la Corée du Sud comptait 25 035 contaminations et 441 décès le 15 octobre, et le Japon 91 402 contaminations et 1 650 morts.

    Ayant tiré les leçons de l’épidémie de syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) de 2015, le gouvernement sud-coréen a rapidement mis en place un traçage efficace de l’origine des contaminations. Sa communication, cohérente et simple, a facilité la mobilisation de la population. Les autorités ont en outre mobilisé les entreprises pharmaceutiques, afin de mettre au point en un temps record des tests de dépistage et disposer ainsi d’une rapide appréciation de la diffusion du virus.

    Lire aussi : En Corée du Sud, les sectes à nouveau au cœur des contaminations au Covid-19

    Ce traçage des contaminations a suscité inquiétudes et débats sur la protection des données individuelles. Des campagnes de harcèlement en ligne de personnes « identifiées », parfois par erreur, comme porteuses du virus grâce aux informations données par les autorités ont provoqué des drames. Les données divulguées ont donc par la suite été limitées au sexe et à l’âge de la personne, aux lieux visités et aux heures de passage, en évitant toute identification. Grâce aux garde-fous mis en place, la population a adhéré aux décisions des autorités, en dépit des menaces potentielles qu’elles font peser sur la protection des données personnelles, voire d’abus de pouvoir des autorités.(...) 

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    • Dernières prières à l’intérieur du monastère de Dadivank.
      Photo : Jonathan Alpeyrie

      Le 9 novembre dernier, un accord d’arrêt total des combats dans le Haut-Karabagh était signé par l’Arménie et l’Azerbaïdjan sous l’égide de la Russie. Son application est contrôlée par quelque 2 000 soldats russes déployés le long de la ligne de front. De retour de Stepanakert et d’Erevan, le photographe franco-américain Jonathan Alpeyrie nous livre son témoignage sur l’issue de la guerre. 

      Comment se passe la mise en place de l’accord ?

      Jonathan Alpeyrie : Ce cessez-le-feu a réellement mis un terme aux combats [contrairement aux trois précédents des 10, 18 et 26 octobre, respectivement sous l’égide de la Russie, de l’OSCE, puis des États-Unis, ndlr]. Il n’y a plus eu de bombardements. La présence des Russes a été efficace de ce point de vue. Les deux camps ont également procédé à des échanges de corps.

      Au niveau stratégique, les Arméniens ont perdu sur toute la ligne. Ils ont même accepté la création, dans le sud de leur territoire, d’un corridor reliant le Nakhitchevan [une région autonome azerbaïdjanaise, coincée entre l’Arménie l’Iran et la Turquie ndlr] au reste de l’Azerbaïdjan. Il en résulte un continuum entre ce pays et la Turquie. La grande question est de savoir pourquoi Nikol Pachinian a accepté autant de concessions. Y a-t-il été poussé par le Kremlin ? 

      Chouchi, Haut-Karabagh, le 13 novembre 2020. Des soldats arméniens s’apprêtent à procéder à un échange de corps avec les troupes azerbaïdjanaises, postées à quelques centaines de mètres de là.
      Photo : Jonathan Alpeyrie

      Comment se déroule le départ des réfugiés arméniens ? 

      J. A. : Avant de partir, ils ont tout détruit. Ils ont brûlé les maisons, abattu leur bétail, leurs chiens… Ils ont aussi coupé tous les grands arbres dans un geste symbolique, mystique. Ces terres sont arméniennes depuis l’Antiquité, elles ont vu vivre leurs ancêtres ; les Arméniens estiment qu’en les quittant, ils doivent faire place nette, ne laisser aucune part d’eux-mêmes aux Azerbaïdjanais qui recoloniseront prochainement la région. C’est un message fort : « Nous vous rendons cette terre vierge. » 

      On retrouve là le côté très dramatique de ce peuple aux racines anciennes, qui a connu de nombreuses guerres, des génocides. Cela n’a rien à voir avec la politique de la terre brûlée : cela n’aurait aucun sens, les Azerbaïdjanais ayant bien assez d’argent pour reconstruire et tout replanter derrière. En revanche, cela en dit long sur les Arméniens et leur état d’esprit actuel. 

      En partant, les habitants de Karvajar ont brûlé leurs maisons, abattu leur bétail et leurs chiens. Photo : Jonathan Alpeyrie

      Les réfugiés ont-ils où aller ? 

      J. A. : Certains se rendent à Stepanakert [la capitale du Haut-Karabagh et la région environnante ne passent pas sous contrôle azerbaïdjanais, ndlr], mais ce n’est pas la majorité. La plupart rentrent en Arménie, où beaucoup ont de la famille. Je pense également que la diaspora arménienne dans le monde continuera d’augmenter. Il ne faut pas oublier que, sur les quelque 12 millions d’Arméniens qui peuplent la planète, à peine 3 millions vivent en Arménie (et environ 160 000 dans le Haut-Karabagh). C’est une population en déclin.

      « Le fatalisme l’emporte clairement en Arménie. »

      Sans doute est-ce le calcul fait par les Turcs, qui tablent sur une disparition du pays en moins d’un siècle et se voient d’ores et déjà récupérant l’intégralité du territoire. La tendance démographique joue incontestablement contre les Arméniens. Or c’est elle qui détermine le destin des peuples à long terme.

      Par ailleurs, la perte des territoires frontaliers de l’Arménie crée une situation très précaire dans le Haut-Karabagh. La région séparatiste est désormais réduite à Stepanakert et à ses alentours. Elle est encerclée par l’Azerbaïdjan. Une route la relie toujours à l’Arménie, mais Bakou n’aurait aucun mal à la couper en cas de reprise des combats. La ville de Chouchi, passée aux mains des Azerbaïdjanais, surplombe Stepanakert : il suffirait à ces derniers de bombarder la capitale du Haut-Karabagh pour la prendre également. 

      Les soldat indépendantistes mettent en place de nouvelles positions défensives après leur défaite à Chouchi. Photo : Jonathan Alpeyrie

      Comment les Arméniens perçoivent-ils l’accord ? 

      J. A. : Le sentiment d’une trahison domine largement. Nikol Pachinian a décidé seul de signer l’accord, sans en parler à personne. En revanche, il est clair que les Arméniens avaient déjà baissé les bras et qu’ils ne nourrissent aucune illusion sur un retour, sur une éventuelle revanche. J’ai assisté à des combats d’artillerie très lourds dans la région de Syunik, dans le sud de l’Arménie ; des troupes azerbaïdjanaises se sont infiltrées en territoire arménien : Erevan a à peine réagi ! Il n’y a pas eu non plus de grande offensive pour reprendre les zones perdues. L’armée arménienne est quasi intacte, elle n’a rien fait. Ce défaitisme, cet aveu d’impuissance sont très étonnants. 

      Le fatalisme, la résignation l’emportent clairement. L’état d’esprit diffère radicalement de celui qui régnait lors de la première guerre, au début des années 1990. C’est difficile à expliquer. Les Arméniens ont-ils été pris de court ? La raison est-elle plus profonde, anthropologique, comme un signe que ce peuple admet inconsciemment qu’il est en train de disparaître ? En dehors de l’assaut du parlement, survenu peu après l’annonce du cessez-le-feu, les manifestations qui ont lieu à Erevan n’étaient pas tellement violentes ni massives. Il y avait peut-être 10 000 personnes dans les rues, les premiers temps [la capitale arménienne compte un peu plus d’un million d’habitants, ndlr], et beaucoup moins ces derniers jours. On ne peut parler de soulèvement populaire visant à renverser le gouvernement pour repartir en guerre. 

      « Tant que les Russes resteront sur place, il n’y aura pas de nouveaux combats. »

      Comment les soldats russes de la force de maintien de la paix sont-ils accueillis par la population locale ? 

      J. A. : J’ai croisé des soldats russes autour du monastère de Dadivank [XIe-XIIIe siècles, ndlr]. Personne ne s’en prenait à eux ou ne les insultait. Ils ne sont pas considérés comme des occupants, pas non plus comme des sauveurs. Le sentiment est mitigé. 

      Le célèbre monastère arménien de Dadivank.
      Photo : Jonathan Alpeyrie

      On évoque l’envoi de soldats turcs pour contrôler le cessez-le-feu. Ankara était pourtant partie prenante dans le conflit via son soutien à Bakou… 

      J. A. : C’est vécu comme une autre trahison. Les Arméniens sont sous le choc. Ils ne peuvent que constater le cynisme de la situation : les Turcs viennent encadrer l’application des accords de paix alors qu’ils ont eux-mêmes provoqué la guerre ! 

      L’accord peut-il instaurer une paix durable ? 

      J. A. : Personne ne le sait vraiment. Tant que les Russes resteront sur place, il n’y aura pas de nouveaux combats [l’accord tripartite prévoit leur présence pendant cinq ans renouvelables, ndlr]. Les Azerbaïdjanais n’ont aucun intérêt à les provoquer. Ils viennent de remporter une grande victoire militaire malgré leurs pertes (en l’absence de bilan officiel, on parle de 15 000 morts côté azerbaïdjanais, contre au moins 2 500 Arméniens tués), une victoire historique. Par ailleurs, la démographie joue en leur faveur [la population du pays, qui compte actuellement 10 millions d’habitants, est en augmentation constante, ndlr], face à une Arménie en peau de chagrin, encerclée… 

      Erevan, de son côté, entretient des relations difficiles avec son principal allié, Moscou, depuis son tournant pro-européen de 2018. Le voisin géorgien (au nord) a peu de chances de lui venir en aide en cas de problème. Rien ne dit que l’alliance avec l’Iran (au sud), pays musulman s’il est besoin de le rappeler, dure longtemps… 

      Quel est le grand gagnant de la séquence ? 

      J. A. : La Russie ! Elle a maintenant des troupes sur le terrain. C’est elle qui a eu l’initiative du cessez-le-feu. Moscou fait vraiment la pluie et le beau temps dans la région.

      Soldats russes près du monastère de Dadivank, le 14 novembre 2020. Les russes ne sont considérés ni comme des occupants, ni comme des sauveurs. Photo : Jonathan Alpeyrie

      La Turquie est l’autre gagnant – mais loin derrière la Russie. Ankara craint Moscou – à juste titre. Elle fait très attention à ne pas l’irriter. Les Turcs ont d’ailleurs très bien joué leur coup en sachant s’arrêter au bon moment, afin de laisser le dialogue ouvert. Cela leur a permis d’obtenir des concessions impensables il y a encore quelques semaines – notamment le corridor de Nakhitchevan.

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      Le démocrate Joe Biden a remporté la victoire dans l'État de l'Arizona, selon les principaux médias américains qui l'ont annoncé, jeudi 12 novembre, sur leurs antennes. Le président élu creuse ainsi l'écart au collège électoral entre lui et son concurrent républicain, Donald Trump, qui ne reconnaît toujours pas sa défaite à la présidentielle américaine. Abonnez-vous à notre chaîne sur YouTube : http://f24.my/youtube En DIRECT - Suivez FRANCE 24 ici : http://f24.my/YTliveFR Notre site : http://www.france24.com/fr/ Rejoignez nous sur Facebook : https://www.facebook.com/FRANCE24.videos Suivez nous sur Twitter : https://twitter.com/F24videos
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    • Le vote anticipé bat un record aux Etats-Unis,

      avec déjà plus de 50 millions de suffrages à la présidentielle

      Par comparaison, cela représente 36,5 % du total des bulletins déposés pour l’élection présidentielle de 2016 (à la fois de façon anticipée et le jour du scrutin).

      Le Monde avec AFP Publié hier à 17h20, mis à jour hier à 18h05

         

      Des citoyens américains faisant la queue pour voter de façon anticipée, le 19 octobre à la mairie de Miami Beach, en Floride.Des citoyens américains faisant la queue pour voter de façon anticipée, le 19 octobre à la mairie de Miami Beach, en Floride. EVA MARIE UZCATEGUI / AFP

      Epidémie de Covid-19 oblige, le vote anticipé bat des records cette année, de nombreux électeurs préférant glisser leur bulletin en avance dans l’urne pour éviter la foule le jour du scrutin. Plus de 50 millions de personnes ont ainsi déjà voté pour l’élection présidentielle américaine qui oppose Joe Biden à Donald Trump, selon le site United States Elections Project, vendredi 23 octobre.

      Selon ce comptage établi par Michael McDonald, chercheur à l’université de Floride, plus de 35 millions de personnes ont déjà voté par correspondance, et plus de 15 millions en personne. C’est d’ores et déjà plus que le nombre de votes anticipés enregistrés en 2016 (plus de 47 millions).

      Article réservé à nos abonnés Lire aussi Joe Biden résiste à un Donald Trump combatif

      Par comparaison, cela représente 36,5 % du total des bulletins déposés pour l’élection présidentielle de 2016 (à la fois de façon anticipée et le jour du scrutin). Il y a quatre ans, le nombre total d’électeurs ayant voté était de 138 millions.

      Ouverture du vote en personne à New York

      Le vote anticipé obéit à des règles différentes selon les Etats. L’un des plus peuplés d’entre eux – et donc des plus dotés en grands électeurs –, l’Etat de New York, ouvrira la possibilité de voter en personne à partir de samedi, ce qui viendra encore grossir le nombre de bulletins anticipés déposés.

      Article réservé à nos abonnés Lire aussi Elections américaines : Joe Biden persévère dans sa stratégie d’esquive

      Les démocrates ont appelé à voter à l’avance comme mesure de précaution, mais l’engouement des électeurs a parfois donné lieu à de longues files d’attente dans les Etats où il a commencé.

      Le camp Trump dénonce, sans preuves à l’appui, une démarche susceptible de « truquer » les résultats et promet que ses électeurs se déplaceront, eux, très largement le 3 novembre pour faire mentir les sondages le donnant battu.

      Article réservé à nos abonnés Lire aussi « L’administration Trump a créé un protectionnisme moderne »

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    • Lutte contre le Covid-19 : les leçons sud-coréenne et japonaise

      La Corée du Sud et le Japon ont été relativement épargnés par le Covid-19 et ignorent la déconnexion entre pouvoir et population. Respect de l’hygiène et responsabilité collective s’y enseignent dès l’école.

       

      Par et Publié aujourd’hui à 01h04, mis à jour à 05h43

       

        

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      Deux femmes portent le masque devant le temple du quartier d’Asakusa, à Tokyo, le 13 octobre.Deux femmes portent le masque devant le temple du quartier d’Asakusa, à Tokyo, le 13 octobre. ISSEI KATO / REUTERS

       

      Analyse. Face à la crise sanitaire provoquée par le Covid-19, la Corée du Sud et le Japon ont agi différemment en matière de mesures gouvernementales. Mais les réactions collectives et individuelles des populations ont été similaires. Si ni Séoul ni Tokyo n’ont recouru au confinement total, les deux pays n’en enregistrent pas moins des bilans de la lutte contre le virus qui peuvent surprendre : en dépit de récentes phases de résurgence, la Corée du Sud comptait 25 035 contaminations et 441 décès le 15 octobre, et le Japon 91 402 contaminations et 1 650 morts.

       

      Ayant tiré les leçons de l’épidémie de syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) de 2015, le gouvernement sud-coréen a rapidement mis en place un traçage efficace de l’origine des contaminations. Sa communication, cohérente et simple, a facilité la mobilisation de la population. Les autorités ont en outre mobilisé les entreprises pharmaceutiques, afin de mettre au point en un temps record des tests de dépistage et disposer ainsi d’une rapide appréciation de la diffusion du virus.

       

      Lire aussi : En Corée du Sud, les sectes à nouveau au cœur des contaminations au Covid-19

       

      Ce traçage des contaminations a suscité inquiétudes et débats sur la protection des données individuelles. Des campagnes de harcèlement en ligne de personnes « identifiées », parfois par erreur, comme porteuses du virus grâce aux informations données par les autorités ont provoqué des drames. Les données divulguées ont donc par la suite été limitées au sexe et à l’âge de la personne, aux lieux visités et aux heures de passage, en évitant toute identification. Grâce aux garde-fous mis en place, la population a adhéré aux décisions des autorités, en dépit des menaces potentielles qu’elles font peser sur la protection des données personnelles, voire d’abus de pouvoir des autorités.

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