Les patrons de la majorité peuvent respirer : l’Assemblée nationale n’a pas assisté, dans la nuit de mardi à mercredi, à la naissance d’un groupe soudé de «marcheurs frondeurs». Plusieurs députés LREM avaient pourtant annoncé leur intention de s’opposer au gouvernement dans l’hémicycle pendant l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). En cause, le financement de plusieurs mesures dites «d’urgence» décidées au début de l’année pour apaiser la colère des gilets jaunes. Dérogeant à la loi Veil, qui date de 1994, l’exécutif a en effet décidé cette année de ne pas compenser dans le budget de la Sécu le coût de deux de ces mesures (avancer l’exonération de cotisations sociales sur les heures supplémentaires et rétablir un taux de CSG à 6,6% au lieu de 8,3% pour une partie des retraités).

«D’une certaine façon, vous faites payer aux gilets jaunes ce que vous leur avez donné il y a quelques mois», a fait valoir le député LR Philippe Gosselin dans l’hémicycle, repris en écho par le communiste Sébastien Jumel. «Vous faites peser sur le peuple le poids de vos propres turpitudes», a dénoncé ce dernier, s’adressant à la ministre de la Santé, Agnès Buzyn. Pour la présidente du groupe PS, Valérie Rabault, le gouvernement fait peser «sur le mouvement des gilets jaunes, le futur déficit de la sécurité sociale».

En commission des affaires sociales, LR, PS, insoumis et PCF, aidés de plusieurs députés LREM, avaient réussi à rétablir la compensation financière. Dans les rangs de la majorité, certains promettaient mardi de voter à nouveau l’amendement en séance plénière mais il a été rejeté largement (93 voix contre 51, dont sept députés de la majorité). «C’était pourtant un amendement important, déplore la député LREM Delphine Bagarry. Cela aurait pu donner des marges budgétaires à la Sécurité sociale pour investir ailleurs, dans les hôpitaux par exemple.» Conclusion du ministre du Budget, Gérald Darmanin, après un débat tendu dans l’hémicycle : «Quand bien même nous aurions retiré cette compensation, il n’y aurait pas eu la [résorption] du trou de la Sécurité sociale.»

Laure Bretton