• Relance : à quoi servira le haut-commissariat au Plan, que Jean Castex veut ressusciter ?

    Relance : à quoi servira le haut-commissariat au Plan,

    que Jean Castex veut ressusciter ?

    Jean Castex, le 8 juillet 2020.Jean Castex, le 8 juillet 2020. − Martin BUREAU / AFPPolitique

    GOUVERNEMENT - Jean Castex a confirmé mercredi sa volonté de créer un haut-commissariat au Plan dans le cadre de la relance du pays frappé par la crise sanitaire. Le nom de François Bayrou circule pour le conduire. Quel serait le rôle d'une telle institution, en place en France de 1946 à 2006 ?

    La composition du nouveau gouvernement n'est pas achevée. Parmi les nominations qui devraient intervenir autour du 16 juillet, l'une des principales nouveautés sera la création d'un haut-commissariat au Plan, confirmée mercredi par Jean Castex. Le nom de François Bayrou circule pour prendre ce poste. L'objectif de ce dispositif gouvernemental sera de "rééclairer l'action publique d'une vision de long terme", a expliqué le nouveau Premier ministre, et "recréer des outils de prospective" face à la crise économique et sociale qui s'annonce. 

    Comme l'a reconnu Jean Castex, "le mot plan a un peu disparu du vocabulaire". Le terme, d'inspiration soviétique, fait bondir les tenants d'un libéralisme économique pur jus. Pour autant, la planification n'a pas été l'apanage, historiquement, des économies socialistes, ou même de gouvernements de gauche. 

    Lors de la présidentielle de 2017, seul Jean-Luc Mélenchon avait prôné une planification, seule à même selon lui de permettre au pays de réussir son virage écologique. Emmanuel Macron a commencé à évoquer le sujet lors de son allocution du 14 avril, en pleine crise sanitaire, estimant que la "refondation" du pays nécessiterait de "bâtir une stratégie où nous retrouverons le temps long, la possibilité de planifier la sobriété carbone, la résilience qui seuls peuvent nous permettre de faire face aux crises à venir". Les autorités étaient alors sous le feu des critiques, pour leur manque d'anticipation présumée dans la gestion de la crise du coronavirus. 

    Quel précédent en France ?

    Si un plan a été élaboré dès le régime de Vichy, la planification à la française a réellement vu le jour en 1946, sous l'autorité du général de Gaulle. Alors que la France sortait économiquement meurtrie de la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement provisoire avait identifié des secteurs jugés prioritaires pour la reconstruction, dont le charbon, la sidérurgie ou encore l'électricité et les transports. Le Commissariat général au Plan, dont le premier commissaire fut Jean Monnet, devait préparer la modernisation du pays en fixant des objectifs pluriannuels pour chaque secteur, permettant aux gouvernements de flécher leurs investissements sur ces priorités. Le leitmotiv était alors : "modernisation ou décadence". 

    Les objectifs fixés dans cet immédiat après-guerre peuvent paraître éloignés, pour certains, de ceux de notre époque. Le décret initial de 1946 - modifié à trois reprises - visait à "accroître la production" ainsi que "le rendement du travail", "assurer le plein emploi de la main d'oeuvre", "élever le niveau de vie de la population et améliorer les conditions de l'habitat et de la vie collective". Le commissaire général et ses équipes - 160 fonctionnaires et contractuels -, rattachés au chef du gouvernement, pouvaient solliciter l'ensemble des ministères, des administrations, et se concerter avec les partenaires sociaux en vue de produire des études et de faire des propositions au gouvernement. Les fameux plans quinquennaux "de développement économique et social" qui ont rythmé l'activité du Commissariat durant 60 ans en étaient le fruit. Ces dispositifs ont permis, notamment dans les années 1960, de lancer de grands projets industriels, de moderniser les équipements scolaires ou encore les transports. Des succès en période de croissance, qui s'accompagnaient toutefois "d'un travers, l'inflation", tempérait sur LCI, jeudi, l'économiste Jean-Marc Daniel. 

    Un modèle tombé en désuétude

    Les plans quinquennaux ont été définitivement abandonnés au début des années 1990, perçus comme "trop dirigistes dans un monde en constante évolution" et inadaptés au nouveau cadre européen, selon France Stratégie, lointain successeur du Commissariat au Plan. Le Commissariat a laissé la place, en 2006, à un Centre d'analyse stratégique (CAS), sur fond de réduction budgétaire. Le mot "plan" a disparu, ne laissant au CAS que la mission "d'éclairer le gouvernement" dans ses orientations stratégiques, à travers un rapport annuel, parmi d'autres institutions du même type comme le Conseil d'analyse économique. 

    Le CAS a cédé la place à son tour, en 2013, à France Stratégie, ou "Commissariat général à la stratégie et à la prospective", qui met en valeur les impératifs environnementaux. Cette institution chapeaute plusieurs organismes, dont le Conseil d'analyse économique, le Conseil d'orientation des retraites, ou encore le Conseil d'orientation pour l'emploi. Elle est chargée, selon le décret de 2013, "d'apporter son concours au gouvernement pour la détermination des grandes orientations de l'avenir de la nation et des objectifs à moyen et long terme de son développement économique, social, culturel et environnemental", essentiellement sur la base d'études prospectives. 

    Le retour du Plan ?

    Avec la création d'un haut-commissariat, l'exécutif semble vouloir remettre au goût du jour le principe de la planification. Il ne s'agirait pas de revenir à une économie administrée, mais plutôt de renouer avec les objectifs d'investissements de long terme, notamment en matière de transition énergétique. 

    "Evidemment, les données structurelles de l'économie française et européennes ne sont plus les mêmes qu'à la Libération, mais la récréation d'un outil du genre du Plan pourrait-elle contribuer à donner un élan et préparer le futur ?", interrogeait en avril l'historien Philippe Mioche, spécialiste du sujet, dans une tribune au Monde. "C'est un outil nécessaire pour orienter efficacement les investissements à venir dans les transitions numérique et écologique", jugeait également jeudi le patron de la CFTC, Cyril Chabanier, qui devait aborder le sujet lors d'une entrevue avec Jean Castex. L'économiste Jean Pisani-Ferry, ancien commissaire général de France Stratégie et soutien d'Emmanuel Macron en 2017, a estimé qu'une planification permettrait d'organiser la transition énergétique ainsi que la relocalisation industrielle.

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