• L'Iran en photos, histoires d'un pays à la dérive

     

     

    27 min
    La Grande table cultureReza & Manoocher Deghati, regard-frère sur l’Iran

    La prise d'otages dans l'ambassade des Etats-Unis

    Du 4 novembre 1979 au 20 janvier 1981, pendant 444 jours, cinquante-six diplomates et civils américains sont retenus en otage par des étudiants iraniens dans l'ambassade des États-Unis de Téhéran.Du 4 novembre 1979 au 20 janvier 1981, pendant 444 jours, cinquante-six diplomates et civils américains sont retenus en otage par des étudiants iraniens dans l'ambassade des États-Unis de Téhéran. Crédits : Reza

    "La prise d'otages dans l'ambassade américaine par les étudiants islamiques a commencé un matin de pluie à Téhéran. C'est vraiment ce qu'on appelle le flair du journalisme qui m'a amené à me dire qu’il pouvait se passer des choses à l'ambassade américaine parce que la veille, Khomeini avait fait un discours très anti-américain. En arrivant, j’ai vu des étudiants en train de grimper les grilles et le mur de l'ambassade pour rentrer à l’intérieur. C’était incroyable de voir ça. Mes photographies, ce sont les seules photographies de ces premiers moments. J'ai continué à photographier cet événement pendant les 444 jours qu’il a duré. Comme je travaillais pour l'agence Sipa Press et pour Newsweek, on m'avait surnommé "le 54e otage" ! Parce que j'étais tout le temps devant l'ambassade, et que je ne bougeais pas de là-bas.

    Les Iraniennes

    Les femmes iraniennes ne pensaient pas du tout être les premières victimes de l’arrivée des islamistes.Les femmes iraniennes ne pensaient pas du tout être les premières victimes de l’arrivée des islamistes. Crédits : Reza

    "Les femmes ont vécu, je dirais, une double souffrance, une double injustice en Iran. Les femmes étaient très actives. Elles croyaient que Khomeini était un vieux sage, qu’il n'avait aucune envie de pouvoir. Elles ne croyaient pas du tout être la première victime de l’arrivée des islamistes, qui les obligeraient à porter des voiles, ou des vêtements comme elles portent aujourd'hui. Les premières manifestations d'opposition, c'étaient des femmes qui sont venues devant le palais du Président, devant des lieux gouvernementaux en disant : on nous avait promis la liberté. Et à peine arrivés au pouvoir, vous nous obligez à porter des vêtements noirs et des voiles…. Les femmes sont les premières qui ont subi cette injustice. Encore aujourd'hui, il y a des manifestations de femmes qui mènent des campagnes contre le voile.  Il y a des jeunes filles de 20 ans qui ont enlevé leur voile en signe protestation et qui se retrouvent en prison. Elles ont été condamnées à vingt ans de prison."

    Les exécutions publiques

    L'une des rares photos d'exécutions publiques prises dans les rues de Téhéran (1980).L'une des rares photos d'exécutions publiques prises dans les rues de Téhéran (1980). Crédits : Manoocher Deghati

    "Quelques mois après la révolution où le peuple iranien a cru se trouver dans une démocratie, on a vu que ce n'était pas du tout ce qui était promis. Cette haine de la part des religieux contre la liberté, contre les gens libres, s'est abattue sur l'Iran. Les arrestations, les exécutions dans les rues ont commencé assez vite. Dans l’une des photos de Manoocher, on voit très bien une exécution en public. C'était le début de milliers d'autres exécutions..."

    La souffrance des Kurdes

    Habitants du village Kurde de Baneh après un bombardement iranien en  1980Habitants du village Kurde de Baneh après un bombardement iranien en 1980 Crédits : Reza

    "Des scènes comme celle-là, quand on les voit pour la première fois, c'est très choquant de se trouver devant une telle injustice, une telle souffrance humaine. Mais de l'autre côté, dans la continuité de ce travail que je mène depuis quarante ans dans d'autres pays du monde, dans d'autres guerres, je vois les mêmes scènes : les pères qui prennent dans leurs bras leurs enfants morts, les mères qui pleurent leurs enfants, les enfants qui pleurent leurs parents. On est tous hantés par ces scènes. Il n'y a pas une scène plus forte que les autres, ça reste en nous. On doit l'absorber, on doit vivre avec. Mais surtout, le plus important, c'est de ne pas s'habituer à voir ces scènes. A chaque fois, ce doit être comme si c'était la première fois. S'habituer à la souffrance pour se protéger, c'est la mort du photojournalisme." 

    Dès le début de la révolution islamique, les Kurdes (qui ont activement participé à la résistance contre la dictature du Chah en 1979) ont exprimé leur souhait d’autonomie. Pour l’ayatollah Khomeini, qui veut asseoir la jeune République, il n’en est pas question. Il déclare la guerre sainte aux Kurdes, surnommés "les fils de Satan". Ce fut une guerre militaire, économique, culturelle et psychologique pendant laquelle des milliers de civils perdirent la vie.

    Un livre pour le peuple iranien

    "J'ai quitté l'Iran en mars 81 à cause de mes photographies qui avaient engendré la rage du régime contre moi. Je ne pouvais plus rester. Je suis resté en contact constamment avec l'Iran, même si la France est devenue mon pays d'adoption, mon pays du cœur. Cela m'a aussi donné cette possibilité d'avoir un regard beaucoup plus ouvert sur l'Iran, et vers d'autres pays du monde. Le monde doit comprendre ce qui s'est passé en Iran et comment ce que nous vivons aujourd'hui au Moyen-Orient avec l'arrivée de Daech, la guerre de la Turquie contre les Kurdes, tout cela est lié. A la base, c'est cette révolution en Iran et l’arrivée des islamistes au pouvoir en Iran qui a engendré tout cela. Ce livre, quelque part, c'est aussi un hymne à ce peuple qui souffre, ce peuple qui se voit constamment mis de côté pour des intérêts économiques mais qui continue à se battre. "

    « 22% des hommes admettent avoir agressé sexuellement une femme Avis défavorable pour le projet de la ferme des 1 000 vaches à Houlbec-Cocherel dans l’Eure »
    Partager via Gmail

    Tags Tags : , , , , , , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :