• La France face aux défis du recyclage

    La France face aux défis du recyclage

    Le projet de loi économie circulaire passera en conseil des ministres début juillet, pour accroître le recyclage et tenir les objectifs européens, dont celui de 90 % de collecte des bouteilles en plastique en 2025. Mais les défis sont nombreux.

     

     

     

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    « 50 types de résines c'est trop, et certaines sont non recyclables, elles perturbent les chaînes de tri », s'est insurgé Jacques Gautier, président du Syctom, le syndicat de gestion des déchets franciliens, lors de l'inauguration le 6 juin du centre de tri du 17e arrondissement parisien. (Myriam Chauvot)

    Publié le 12 juin 2019 à 8h15

    En juillet 2017, Edouard Philippe avait assigné à la France l'objectif de recycler 100 % de ses déchets en plastique en 2025, contre 22 % en 2016 (déchets ménagers, industriels et commerciaux confondus). Un objectif inatteignable − les meilleurs en Europe sont à 40 %. Deux ans plus tard, la France sort de l'incantatoire. Le projet de loi économie circulaire passera en conseil des ministres début juillet, pour accroître le recyclage et respecter les objectifs européens, dont celui de 90 % de collecte des bouteilles en plastique en 2025. Reste que les défis sont nombreux.

    Recycler le plastique n'a de sens que si les industriels réincorporent la matière recyclée, or ils ne se bousculent pas. L'Europe a donc imposé un quota minimum d'incorporation de plastique recyclé à partir de 2025. Mais seulement pour les bouteilles. Sur ce créneau, le pionnier est le groupe Roxane (Cristaline), n° 3 de l'eau en bouteille. En toute discrétion, il a mis du plastique recyclé dans ses bouteilles bien avant Nestlé et Danone et il est le seul embouteilleur à avoir un site de recyclage.

     

    Intégration

    Cette intégration du recyclage chez l'industriel est l'avenir, mais à condition qu'il ait des déchets à recycler. Or seules 57 % des bouteilles de boissons sont collectées (une sur dix à Paris), les poubelles de l'espace public (voiries, gares, etc.) allant en incinération ou en décharge. Accroître la collecte est donc aussi un défi. Roxane l'a relevé en mettant chez Auchan des automates de collecte des bouteilles usagées. Le projet de loi va plus loin en ouvrant la porte à la consigne. Toutefois, les centres de tri des collectivités locales  perdront leur modèle économique si le bac de collecte sélective se vide . Pour accroître la collecte différemment, la start-up Yoyo teste donc dans sept villes un système incitatif où 25.000 ménages remplissent contre récompense des sacs de déchets en plastique, remis à la collectivité. Pour l'heure, Yoyo est un succès mais entre les différents types de collecte, la France tâtonne.

    Reste le défi technique du recyclage du plastique, vu le nombre de résines que le terme recouvre, allant du PET (la résine incolore des bouteilles d'eau, la plus recyclable) au polystyrène des pots de yaourt (un casse-tête technique), sans compter les additifs perturbant le recyclage (le dioxyde de titane pour un PET blanc opaque, le noir de carbone pour des barquettes alimentaires noires, etc.) et les emballages inrecyclables car conjuguant plusieurs résines.

    « 50 types de résines c'est trop, et certaines sont non recyclables, elles perturbent les chaînes de tri », s'est insurgé Jacques Gautier, président du Syctom, le syndicat francilien, lors de l'inauguration le 6 juin du centre de tri du 17e arrondissement parisien, qui a coûté la bagatelle de 67 millions d'euros. « Le noir de carbone rend le plastique inrecyclable, mais les services marketing de l'agroalimentaire y tiennent, ils disent que ça fait premium… » observe un fabricant de machines de tri optique.

    Recyclage chimique

    Imposer l'écoconception aux industriels, l'idée fait son chemin, même si la technique peut repousser les limites du recyclage quand il existe un modèle économique. Ainsi, « depuis trois ans, nous avions arrêté notre usine pilote de Bristol (Angleterre), qui permet de produire des carburants à partir de déchets plastiques non valorisables (le « waste to fuel »), témoigne Jean-Marc Boursier, directeur général adjoint chez Suez. A la suite de la directive européenne RED II de fin 2018, qui impose l'incorporation aux carburants 15 % de produits non fossiles en 2030, nous négocions sa réouverture d'ici début 2020. »

     

    Pour les déchets plastiques inrecyclables par des techniques mécaniques, le recyclage chimique est le grand espoir de demain. Il casse les molécules, transforme les polymères en monomères pour recomposer des matières vierges. C'est ainsi qu'à Strasbourg, Soprema, un fabricant de produits d'isolation pour le bâtiment, inaugurera début juillet une unité de recyclage chimique. Elle convertira les déchets plastiques en polyols, le composant de base de la mousse polyuréthane servant aux panneaux d'isolation des façades de bâtiments. « A ma connaissance, c'est une première mondiale », commente Pierre-Etienne Bindschedler, qui dirige la PME.

    Mais les quantités traitées par Soprema resteront modestes et les miracles de la technique n'exonèrent pas du devoir de réduire la consommation de plastique. Car recycler s'apparente à reculer pour mieux sauter, les objets en plastique de seconde génération créant de nouveaux problèmes encore mal cernés, à l'instar des microplastiques que relarguent dans l'air et dans l'eau de lavage les polaires fabriquées en plastique recyclé.

    Myriam Chauvot

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